La chute de #Goma vue par Twitter

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Les médias se sont attardés ces derniers jours sur la guerre par compte Twitter interposé entre le Hamas et l’armée israélienne. L’opération pilier de défense a presque éclipsé un autre conflit, celui qui faisait rage au Nord-Kivu. Dans les médias traditionnels peut-être, mais pas sur Twitter.

 Le dimanche 18 novembre, au matin, la prise de Goma semblait imminente. Je commençais à passer des coups de fil et par pur réflexe, j’ouvre mon compte Twitter. La question que je posais à chacun de mes interlocuteurs était toujours la même : Jusqu’où ont progressé les rebelles du M23?  Sont-ils à 2, 5, 7 kilomètres du centre de Goma? De l’aéroport? La situation évolue vite.

Les habitants des quartiers périphériques de Goma me disent qu’ils entendent déjà les coups de canon. Qu’ils voient les hélicoptères de la Monusco décoller. Alors que @radiookapi passe de la musique, Simone Schlindwendein, une journaliste allemande (@schlindwendein), vient elle de dépasser l’aéroport. D’un tweet, elle confirme que l’aéroport est toujours sous contrôle de la Monusco, mais aussi des FARDC. Rien d’évident. Le porte-parole de l’armée confirme ce dont les habitants de Goma témoignent. Les soldats congolais ont reçu l’ordre de se replier sur Saké.

Deux tweets plus tard, @schlindwendein signale qu’elle est à Kibati avec le M23. Les rebelles affirment ne pas vouloir marcher sur Goma. Il pleut très fort, ce qui gêne peut-être leur progression. Simone  Schlindwendein, la correspondante du TAZ, n’est pas la seule à twitter en temps réel ce conflit. Sur le terrain, Mélanie Gouby d’Associated Press (@Melaniegouby), le photographe de l’AFP, Phil Moore (@fil) ou encore Gabriel Gatehouse de la BBC (@ggatehouse) partagent aussi leurs observations avec leurs followers, les positions des rebelles ou des FARDC, l’ambiance à Goma, les coupures d’eau, d’électricité, une certaine forme de lassitude… Tout ce qu’on peut dire sur ce conflit en 140 caractères. C’est peu, mais c’est déjà beaucoup.

Rétablir les faits, c’est ce qui semblait préoccuper la trentaine de twittos qui suit quotidiennement l’actualité du pays. Beaucoup avec une arrière-pensée idéologique, il faut bien le dire. Les échanges étaient particulièrement virulents sur la question du soutien du Rwanda au M23, de son implication dans la crise dans l’est du Congo et ce depuis les différentes publications du groupe d’experts de l’ONU.

En première ligne, côté rwandais, Louise Mushikiwabo (@LMushikiwabo), la ministre des affaires étrangères est une adepte de Twitter. Dans l’équipe de riposte, il y a aussi Olivier Nduhungirehe, le premier conseiller de la mission permanente du Rwanda à l’ONU (@onduhungirehe), des journalistes comme Albert Rudatsimburwa (@albcontact), Fred Mwasa (@mwasa) ou encore Arthur Asiimwe (@aasiimwe) et des OVNI comme Phil Quin (@philquin).

Ils répondent à tout propos négatif tenu sur la Rwanda ou toute information qui viserait à mettre en cause Kigali. Leurs cibles favorites, Steven Hege, le patron du groupe d’experts de l’ONU, le souvent très pertinent chercheur Jason Stearns (@jasonkstearns) et la Monusco (@MONUSCO) avec la création d’un hashtag spécifique pour moquer la mission de l’Onu en RDC, #Monuseless. Mais il faut bien avouer que les Rwandais n’étaient pas les seuls à railler la force onusienne dont la communication sur twitter avait de quoi laisser perplexe. A titre d’exemple, ce tweet datant du 27 septembre : « La #MONUSCO fait un travail remarquable aux côtés des #FARDC pour combattre le #M23 » alors que cette dernière est accusée de n’avoir rien fait pour protéger la ville de Goma lors de l’offensive rebelle, ni même pour les civils à Minova, victimes d’exactions commises par les forces armées congolaises.

Si le Rwanda a depuis longtemps investi les réseaux sociaux, les autorités de la République démocratique du Congo sont quasiment absentes du site de microblogging. Le compte de Joseph Kabila (@President_RDC) est aussi silencieux que son titulaire. Le dernier tweet date du 7 octobre 2010. Le ministre de la communication Lambert Mendé (@Lambert_Mende) se présente dans sa biographie comme la « la voix de la RDC », mais ne s’exprime quasiment jamais. Idem pour le premier ministre Matata Ponyo (@PonyoMapon).  Au point que certains affirment même que ces comptes twitter sont des faux.

Bref, rien de très organisé. La charge contre le Rwanda est plutôt portée par des blogueurs des grands lacs comme @Rwandankunda,  @MrBasabose ou par des opposants rwandais comme  Victoire Ingabire. Le compte twitter de la présidente des FDU (@VictoireUmuhoza), condamnée par la justice rwandaise à 8 ans de prison pour négationnisme et conspiration, est toujours très prompt à réagir à toute nouvelle qui pourrait embarrasser le pouvoir à Kigali. Finalement, ce sont les autorités ougandaises qui s’en sortent plus tôt bien. Dans les médias, comme sur Twitter, le rôle de Kampala dans la crise à l’est du Congo et les accusations du rapport d’experts de l’Onu le concernant n’ont été qu’assez peu relayés.

Au-delà du conflit entre les pro et les anti-Rwanda, c’est l’inexactitude qui est traquée. Certains twittos se transforment même parfois en gardiens du temple comme @ethuin, @ChangeAI, @texasinafrica ou encore @digitaldjeli. Loin de moi, l’idée de leur jeter la pierre. Il y a tellement d’approximation, de simplification et de désinformation dans tout ce qui se dit et s’écrit sur l’est du Congo.

Sonia Rolley

Sonia Rolley

Sonia Rolley est journaliste indépendante, auteure de «Retour du Tchad – Carnet d’une correspondante» chez Actes Sud (2010).

Sonia Rolley

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