Les passeurs turcs s’adaptent et prospèrent

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Sur la place centrale d’Aksaray, quartier d’Istanbul qui compte une importante population de réfugiés, Haroun Yamani tente de rassurer les potentiels clients qui aspirent à un avenir meilleur en Europe, mais s’inquiètent du dangereux trajet en bateau qui les y mènera.

Enchaînant les cigarettes, cet homme mince affirme que, contrairement à d’autres passeurs connus pour s’être enfuis avec l’argent de réfugiés, il est « un homme bon » et que s’il demande un prix aussi élevé que 1 300 dollars par personne, c’est parce qu’il y a « des voies dangereuses et d’autres plus sûres, qui coûtent donc plus cher. »

En réalité, les aspirants au passage, originaires de Syrie, d’Irak, d’Afghanistan et d’autres pays déchirés par des conflits et économiquement défavorisés, pourraient bien payer pour leur propre mort. Lundi, alors que la chancelière allemande Angela Merkel, en visite en Turquie, appelait de ses vœux que la répression des passeurs donne des « résultats rapides » et tandis que le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu demandait une plus grande implication de l’OTAN, les vents hivernaux ont balayé la mer Égée et retourné deux embarcations, faisant au moins 33 morts.

Suite à son récent et controversé accord avec l’Union européenne (UE), la Turquie a intensifié sa campagne de lutte contre le trafic de migrants. Le réseau de M. Yamani est confronté à une présence policière renforcée le long de la route d’Istanbul et de la côte. Il assure cependant à ses clients avoir des contacts infiltrés qui les informent du besoin éventuel de contourner un poste de contrôle ou de soudoyer des agents.

Selon M. Yamani, le prix du passage est environ deux fois moins élevé qu’en été, quand les eaux sont plus calmes et que les risques de naufrage et d’hypothermie sont réduits. Il ajoute cependant que les trajets en hiver sont « confortables, pas dangereux, si Dieu le veut. »

Peut-être le sait-il, mais il se garde bien de mentionner que depuis le début de l’année 2016, plus de 360 personnes sont mortes ou ont disparu en tentant de traverser la mer Égée, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). On comptait 82 morts pendant la même période l’année dernière.

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