Conférence Nationale Humanitaire : prendre le Ministre au mot

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Le 31 mars dernier, le Centre de Conférences du Ministère des Affaires Etrangères faisait salle comble pour la deuxième édition d’une Conférence Nationale Humanitaire. A l’heure des bilans, d’aucuns peuvent être tentés de jeter un regard désabusé sur l’évènement ; qu’en est-il sorti de nouveau finalement ? Quel impact en attendre pour l’action humanitaire ? Les thématiques abordées n’étaient pas nouvelles : enjeux autour du respect des principes humanitaires, de la diversité des acteurs, des contextes d’états fragiles, du lien URD… autant de sujets qui traversent en continu l’action humanitaire et sur lesquels il parait difficile de proposer des avancées décisives en une journée, quelle que soit la qualité des intervenants et l’efficacité de l’organisation.

 

Reste que l’affluence de participants, l’appétit de chaque organisation à contribuer aux débats, la présence de personnalités de haut niveau (2 Ministres, une Secrétaire Générale adjointe des Nations Unies, une Commissaire Européenne) ont démontré s’il en était besoin l’intérêt que pouvait susciter un tel évènement.

La journée, organisée autour de quatre tables rondes en plénière a été dense, ponctuée de moments informels et utiles aux rencontres et aux échanges. Elle constitue un point d’étape dans la réflexion collective ; un temps de visibilité pour l’action humanitaire au sein du microcosme français de la solidarité internationale ; mais aussi, et c’est souvent l’intérêt principal d’évènements officiels de ce genre, une occasion de prendre date avec un certain nombre d’engagements exprimés dans les allocutions officielles des personnalités politiques présentes et en particulier de notre Ministre des Affaires Etrangères.

Laurent Fabius a réaffirmé la mobilisation de la France sur la question des moyens alloués à la politique humanitaire européenne, et en particulier, sa volonté que soit préservé le budget d’ECHO. Ce soutien vient appuyer les propos déterminés et rassurants tenus à ce sujet par la Commissaire Européenne Kristalina Georgieva. Il constitue une réponse à l’inquiétude des ONG quant aux difficultés financières rencontrées par ce bailleur clé pour l’aide humanitaire dans le monde. Les ONG resteront mobilisées sur cette question et continueront à compter sur le soutien du gouvernement français concernant le budget d’ECHO en 2014 et sa sécurisation pour les années à venir.

Le Ministre a par ailleurs confirmé l’engagement que la part d’APD transitant par les ONG doublerait, en précisant que cette augmentation bénéficierait également à l’action d’urgence. La réalisation de cette promesse sera bien évidemment l’objet de toute l’attention des ONG dans les années qui viennent.

L’hommage appuyé qui a été rendu à l’action des ONG, leur engagement et leur dévouement en particulier dans les contextes difficiles, devrait se traduire dans les faits par une reconnaissance formelle de la spécificité de la situation du personnel humanitaire. Aujourd’hui, le flou créé par l’article 22 de la loi dite « Kouchner »(1) accroît encore le risque que constitue pour les ONG le fait de travailler dans certaines zones classées « rouges », pourtant caractérisées par des besoins humanitaires particulièrement importants. Les ONG attendent qu’un décret excluant formellement les humanitaires du champ d’application de cet article vienne clarifier la situation.

Enfin, un certain nombre de pistes de travail et de dialogue ont émergé : il a été question de continuer à s’engager pour faire respecter les principes humanitaires… comment cela peut se traduire concrètement sur des crises aussi complexes que celle de la crise syrienne par exemple ? Laurent Fabius a annoncé vouloir consacrer une part des moyens de l’aide à la résilience des populations et la prévention des catastrophes naturelles… selon quelle stratégie, avec quels types d’outils et comment dans un contexte budgétaire aussi contraint ? Autant de sujets dont les instances de concertation existantes doivent se saisir dès à présent, pour montrer qu’une conférence peut finalement aboutir à des résultats concrets faisant progresser les modalités de l’action humanitaire.

 

(1) L’article 22 de la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’Etat prévoit la possibilité pour l’Etat d’exiger le remboursement de tout ou partie des dépenses engagées à l’occasion d’opérations de secours à l’étranger au bénéfice de personnes « s’étant délibérément exposées à des risques qu’elles ne pouvaient ignorer ».