« Si tu veux concevoir la paix, dépose d’abord les armes » Alain.
Il se faisait plus discret et pour cause, depuis plusieurs mois, l’âge l’avait rattrapé physiquement mais pas mentalement. Il voulait continuer à se battre, au nom de ses idéaux, de ses convictions, contre l’irréparable et pour la vie. Lui qui n’arrêtait plus un jour depuis trois ans, voilà que son corps lui rappelait cet âge auquel aucun de nous ne voulait croire tant son énergie était unique et encore communicative. Il se disait encore heureux ; là est l’essentiel.
Stéphane Hessel est mort à Paris la nuit dernière.
Nous retiendrons tous de lui ce formidable engouement mondial qu’il a provoqué avec la parution d’Indignez vous il y’a trois ans, et qui a provoqué un sursaut chez nous tous, humaniste, social, et un peu révolutionnaire aussi. Que n’a t-on pas dit de lui ? Né en Allemagne à Berlin en 1917, combattant, résistant par la suite, déporté à Buchenwald, ancien ambassadeur, corédacteur dela Déclaration des Droits de l’Homme de 1948, il était bien plus que ses titres ne le définissaient.
Inlassable voyageur du rêve, défenseur des droits de tous les hommes, auteur à succès malgré lui puis prolifique conférencier et témoin de son temps, il parcourait le monde depuis deux ans et assistait un peu dépassé à la traduction en près de 100 pays d’Indignez-Vous, vendu à ce jour à près de 4 millions d’exemplaires.
Monsieur rassurant, pater ou grand-père que l’on aurait tous aimé avoir, il était devenu un diffuseur de valeurs humaines dans nos sociétés déphasées. Il est toujours bon d’avoir un homme mûr, traversé par toutes les expériences de la vie dû à son grand âge, rôdé à près d’un siècle sur cette terre, qui vous rappelle ce que doivent être les rapports humains dans ce monde matériel et désenchanté.
Stéphane Hessel a apporté du rêve mais surtout de la réalité : comme une prophétie autoréalisatrice, il a tellement défendu et promu son indignation sur ce Monde qu’il ne comprenait plus, au moment des révoltes contre les crises économiques et sociales multiples en Europe depuis 2008 que plusieurs mouvements sociaux comme en Espagne par exemple, se firent même appeler le mouvement des Indignés. S’indigner est une chose, constater aussi, mais agir en est une autre. Et l’Engagement qu’il défendait nous a tous parlé à un moment ou à un autre.
Ses publications étaient tout un programme : la révolte, la réaction et l’action. Diffuseur d’espoirs, il voulait réenchanter le monde et avait publié un ouvrage avec Edgar Morin au titre très symbolique : Le chemin de l’espérance. Puisse ce message d’un homme exceptionnel passé comme une fusée sur notre planète demeurer intemporellement comme un message de vie et de mieux-être. Cher Stéphane Hessel, même si l’un de vos derniers opus s’intitulait« Vivez », il n’y a plus qu’une chose à ajouter : « Reposez en paix », vous l’avez bien mérité. Cette paix que vous avez défendu toute votre vie.