Bas-Congo : les hommes s’impliquent dans la planification familiale

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A Matadi et Boma, les deux principales villes du Bas-Congo, au sud-ouest de Kinshasa, les hommes s’impliquent dans le planning familial pour limiter les naissances, arguant le manque de moyens pour nourrir une grande famille et la nécessité de préserver la santé de leurs femmes. Ce faisant, ils contribuent aussi à réduire la mortalité maternelle et infantile.

« J’ai déjà des difficultés à nourrir ma fille. Je n’aurai un deuxième enfant que lorsque j’aurai les moyens », affirme ainsi un jeune parent de Matadi. A 27 ans, il a convaincu sa femme qui a une fillette de 3 ans d’aller à l’hôpital où elle reçoit désormais chaque mois une piqûre pour ne pas tomber enceinte.

Enseignant à Boma, à une heure de route au Sud de Matadi, René Makiese, 37 ans, est parvenu, lui, à dissuader son épouse qui voulait à tout prix avoir un quatrième enfant. « Le temps où l’on pensait qu’il faut avoir beaucoup d’enfants dans l’espoir que l’un d’eux sera une autorité et viendra à la rescousse des parents et petits frères est révolu, dit-il. La vie est dure. Il faut tout planifier, même les naissances ». Pour éviter une grossesse non désirée, ce couple dit utiliser des préservatifs et des implants contraceptifs. « C’est aussi ennuyeux d’être toujours enceinte. Parfois, vous ne savez plus vous mouvoir. La vie, ce n’est pas seulement les enfants, il y a aussi le travail, les études.. » affirme Bibiane qui a fini par se laisser convaincre. Leur enfant cadet a déjà six ans.

Réduire la mortalité maternelle

Ils sont de plus en plus nombreux à Matadi et Boma, ces hommes qui prennent les devants de la planification familiale. Les couples dont l’âge varie entre 25 ans et 40 ans, utilisent différentes méthodes contraceptives pour stopper ou espacer les naissances : des préservatifs, des pilules, patch, anneau, stérilet…

A l’ABEF-ND, l’association qui s’occupe du « bien-être familial et des naissances désirables », Adeline Mbuzi, infirmière titulaire, reconnait qu’ils reçoivent davantage de couples. Outre le manque de moyens financiers pour subvenir aux besoins de la famille, les époux justifient aussi leur comportement par leur désir de laisser se reposer leurs femmes. « Mon médecin m’a dit qu’en donnant naissance à beaucoup d’enfants le corps de mon épouse se fatigue, ce qui peut causer la mort ou des avortements. Je veux l’éviter à ma femme. Elle doit demeurer forte pour élever les enfants et surtout pour qu’elle ne fane pas si tôt », explique Parfait Manzila, 34 ans, trois enfants, qui dit ne plus en vouloir.

Cette implication des maris réjouit les professionnels de santé. « Ils aident les femmes à reconstituer leur santé et luttent ainsi contre la mortalité maternelle et infantile très élevée au pays », reconnaît, fière, Adeline. Le Programme national de la santé de la reproduction (PNSAR) au Bas-Congo pense que ce nouveau comportement va contribuer à faire baisser la mortalité maternelle. Car dans le monde, « quatre femmes meurent chaque heure suite aux complications pendant la grossesse au cours de l’accouchement ou après celui-ci et un enfant sur cinq meurt en RDC avant son premier anniversaire », rappelle Didienne Bunga, chef de division du Genre, femme et enfant, qui se réjouit de l’attitude des hommes.

Enfant, signe de richesse

La mentalité n’évolue pas encore partout dans la province, surtout dans les campagnes où la tradition « Kongo » veut que l’enfant soit signe de richesse. Les familles poussent le plus souvent leurs filles à avoir de nombreux enfants et la planification familiale a du mal à passer. « J’ai eu 10 enfants et je n’en ai perdu aucun. Bien que je sois fatiguée, je continue de vivre », se targue Madeleine Mujinga, une habitante de Nzanza à Matadi.

Pour d’autres femmes, la maternité est l’unique occasion pour obtenir un nouveau pagne de leurs époux… Une certaine croyance religieuse constitue aussi un frein à la planification de naissances. Mettant en avant la parole biblique qui leur demande de se « multiplier et de remplir la terre », des chrétiens affirment que personne ne peut se substituer à Dieu. Une mentalité que réfute la chef de la division provinciale du Genre, femme et enfants. Consciente du danger qui mine surtout les campagnes, elle a lancé début novembre 2012 à Mbanza-Ngungu, une mobilisation sociale en faveur de la santé de la mère et de l’enfant et la promotion des méthodes de planification familiale.

Auteur: Alphonse Nekwa Makwala

Syfia International

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